Séminaire intitulé : « Les Règles de Rotterdam »

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L’Association Marocaine pour la Logistique (AMLOG) a organisé le 28 Janvier 2010 à Casablanca à l’Hôtel Hyatt Regency un séminaire intitulé : « Les Règles de Rotterdam »
Ce séminaire a pour objectif de débattre une question d’actualité, celle des enjeux des règles de Rotterdam en général, et de répondre à des questions multiples en ce qui concerne les effets positifs et négatifs de ces règles sur les pays chargeurs comme le Maroc.
La présence à ce séminaire de Madame Nadia LARAKI, Directrice de la Marine Marchande, et de Monsieur El Eid MAHSOUSSI Secrétaire Général du Ministère du Commerce Extérieur, atteste de l’importance de ce séminaire pour les hauts responsables de l’Etat marocain. La présence effective d’autres responsables d’autres ministères (Ministère de la Justice), d’institutions de régulation (ANP), d’opérateurs économiques (Marsa Maroc, ATLANTA Assurances, SNTL, UNIVERSAL SHIPPING, IPLT, SUPTEM, etc.) et d’associations professionnelles (AFFM, Asmex, ATDAM, CCAM, ACOPM, etc.), confirme la réussite de ce séminaire.
Un certain nombre de questions pertinents ont été posées auxquels d’éminents experts, professeurs et professionnels ont apporté des réponses.

Ces questions peuvent être résumées comme suit :

• Les règles de Rotterdam permettent-elles un rééquilibrage de la relation entre les transporteurs et les chargeurs et vont-t-elles contribuer à la clarification du droit maritime (au moins pour les chargeurs marocains, le Maroc étant un pays chargeur) ?

• Les règles de Rotterdam vont-elles sécuriser les relations chargeurs/ Transporteurs ? Existe-t-il des innovations majeures dans ces règles ? La liberté contractuelle défendue par ces règles est–elle la solution à tout problème ? Ces règles assurent-elles une bonne gouvernance entre les opérateurs de la chaîne logistique globale ?

• Ces règles de Rotterdam seraient-elles pour promouvoir le développement du transport maritime marocain à courte distance et les autoroutes de la mer en émergence au Maroc ? Cette convention est–elle bonne pour l’industrie et le commerce marocains ?

Ces questions ont permis d’élargir le champ de discussion et de réflexion entre opérateurs, institutions, responsables publics, etc. qui s’intéressent à la question des relations contractuelles entre transporteur et chargeur.
La synthèse de ce séminaire est de faire une étude comparative entre l’apport de ces règles et les conventions existantes (Convention de Bruxelles de 1924, les protocoles de 1968 & 1979, les Règles de Hambourg, la Convention de Genève de 1980 qui n’est pas entrée en application).

Les innovations des Règles de Rotterdam : Le champ de ces règles est le contrat de transport maritime. La présence d’un titre de transport ou d’un autre document n’est pas une condition de l’application des règles. Ces règles introduisent une modernité par la reconnaissance de « documents électroniques du transport ». Aussi ces règles traitent les contrats de transport multimodaux. Ces règles innovent au niveau de la responsabilité du transporteur en supprimant la faute nautique (comme les Règles de Hambourg) et étendent la responsabilité du transporteur pendant toute la durée totale du transport. Le transporteur est responsable pour perte, dommage ou retard. La limitation de responsabilité a été rehaussée à 875 DTS par colis ou unité ou 3 DTS par kg par rapport aux Règles de Hambourg (835 DTS ou 2, 5 DTS).etc.

Apparemment ces règles de Rotterdam sécurisent les relations ente chargeurs et transporteurs : augmentation du plafond de responsabilité du transporteur : suppression de la faute nautique (Convention de Bruxelles de 1924), droit de contrôle du chargeur, indemnisation du retard (qui n’existait pas dans la Convention de Bruxelles de 1924, mais introduite dans les Règles de Hambourg de 1978). Mais la lecture des règles révèle des zones d’ombre. Le nombre d’articles est impressionnant 96 articles. Souvent longs et entachés d’ambiguïtés, difficile à lire même pour des spécialistes et manquent de clarté. En outre, le transporteur a la possibilité de limiter la période de sa responsabilité à sous palan /sous palan. Le principe même de la responsabilité est complexe et déséquilibré à l’avantage du transporteur (les règles réintègrent les cas exceptés d’exonération de responsabilité sauf la faute nautique un pas en arrière par rapport aux Règles de Hambourg). Toutefois, l’éminent professeur Philippe DELEBECQUE, « ne pense pas qu’on puisse dire que le système de responsabilité est « déséquilibré » en faveur du transporteur : le système prévu par l'art. 17 et clarifié par rapport au système actuel et l'art. 17-5 est même favorable au chargeur : il suffit que celui-ci allègue (sans avoir à prouver) une innavigabilité pour réintroduire la responsabilité du transporteur. Le chargeur peut agir contre la partie exécutante, art. 19, aussi ses obligations sont impératives, art. 79-1.De plus, l'art. 13-2 est, semble-t-il, limité par l'art. 12-3. »
L’article 80 qui institut la liberté contractuelle est obscure et sources de futures litiges au profit du transporteur. Le « contrat de volume » est un piège pour les petits et moyens chargeurs. Ce contrat permettra au transporteur de réduire le champ de sa responsabilité et choisir la juridiction la plus favorable pour lui. Cette liberté souhaitée même par les chargeurs fragilisera la position du destinataire et mettra en péril les lettres de crédit. Néanmoins, le professeur Philippe Delebecque souligne : « Quant à l'art. 80, il ne faudrait pas oublier qu'il y a désormais de solides conditions de forme et de fond qui l'encadrent. La jurisprudence nationale saura veiller au grain. »

Ces règles sont favorables aux méga-carriers et gros chargeurs ainsi qu’aux prestataires de service logistiques mondiaux. Les petits et moyens chargeurs ainsi que les armateurs et transporteurs marocains ne sont pas en position de force pour faire face aux risques de ces règles de Rotterdam.

Au niveau des trafics de Short Sea Shipping et des autoroutes de la mer impliquent le multimodal. Apparemment les Règles de Rotterdam sont faites aussi pour le multimodal (article 26). Le problème se posera en cas de litige. Comment le juge apprécierait-il le mot « international » pour appliquer les conventions CMR ou CIM en cas de problème au niveau du transport terrestre? Le risque serait que les juges considéraient que ces deux conventions sont d’application régionale et appliqueraient les Règles de Rotterdam à la place. Le même problème se posera pour le pré et post acheminement terrestre au niveau d’un espace national : comment les juges seraient ils en mesure d’appliquer la CMR ou CIM pour la partie transport effectuée au niveau local à la place de la loi nationale? Cependant, le professeur Delebecque ajoute « Enfin l'art. 26 ne devrait pas en Europe - largement comprise -soulever de difficultés. Certes le renvoi est-il fait aux seules conventions internationales, mais ces conventions sont applicables (en tout cas pour la CMR) au Maroc. Le seul problème se pose pour de pays comme le Japon ou encore aux E.U où il n'y a pas de conventions internationales terrestres applicables. Il n'est pas certain qu'un juge japonais ou américain en tienne compte. Mais une telle question échappe nécessairement au législateur international »

Au Maroc, les responsables suivent une politique sage. Ils veulent peser le pour et le contre avant d’engager le Maroc dans ces nouvelles règles. Le Maroc est un pays chargeur. Il a tout intérêt à défendre ses chargeurs tout en soutenant ses transporteurs. Le Maroc devrait adopter une attitude de « wait and see » pour suivre la position des chargeurs européens qui sont a priori contre les règles de Rotterdam.

Une éventuelle adhésion du Maroc à ces Règles devrait s’accompagner :

- du renforcement du conseil des chargeurs marocains,
- de l’appui à un secteur maritime moderne et bien concentré
- d’une aide à l’émergence de prestataires de services logistiques leaders purement marocains.
- Last but not least, une formation des juges, avocats et opérateurs en droit maritime et droit des transports appliqués et en techniques professionnelles du commerce maritime et en logistique.


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